TRIBUNAL INTERNATIONAL
DES CRIMES CONTRE LES FEMMES
4, 5, 6, 7 et 8 mars 1976
Palais des Congrès - Bruxelles (Belgique)
* 4 mars : Maternité forcée, crimes médicaux et psychiatriques.
* 5 mars : Travail ménager non payé, travail salarié.
Oppression des femmes des minorités raciales.
* 6 et 7 mars : Violence contre les femmes (viol, femmes battues);
des
femmes en prison.
* 8 mars : Séance de clôture avec déclaration des Droits
des Femmes.
En bref : plus de mille femmes, venues de partout dans
le monde, se sont retrouvées à Bruxelles.
Il y eut peu, sinon pas du tout, de réflexion approfondie sur l’oppression
des femmes, nous en sommes restées à la condition des femmes.
Donc, c’est par voie de témoignages que les journées se sont déroulées.
Néanmoins, dans les couloirs du Palais des Congrès, des rencontres
se sont faites et c’est sûrement grâce à cela qu’un travail
de réflexion et de dénonciation pourra continuer à se faire
à un niveau plus international.
Les témoignages qui suivent ont été choisis parmi ceux
qui ont été lus à Bruxelles à la tribune du Palais
des Congrès.
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Bruxelles, le 8 mars 1976
LE TEMOIGNAGE D’UNE FEMINISTE ACHARNEE...
" ... Nous ne tolérons plus notre effacement
ni le fait d’être reléguées dans un coin ainsi que des poids
morts.
Nous possédons en nous des valeurs égales à celles des
générations plus jeunes à offrir à la société
tout entière et à chacun de ses membres. À cause de ces
années vécues, nous avons été fatalement témoins
de beaucoup plus de choses, et cette expérience peut donner une autre
dimension aux réflexions d’aujourd’hui. Nos joies, nos réussites
ou nos échecs passés nous ont donné une certaine paix spirituelle.
À aucun prix nous ne voulons imposer nos idées aux plus jeunes,
mais les échanger, les partager d’un côté comme de l’autre.
Ces crimes commis contre les femmes doivent être combattus. Nos enfants
volent de leurs propres ailes, nos amis nous oublient ou disparaissent et, ainsi,
nous nous retrouvons très isolées.
Le grand crime aussi, c’est que, contrairement aux femmes plus jeunes qui sont
considérées comme objets sexuels, nous devenons aux yeux des autres,
des êtres asexués, sans aspiration, sans devenir.
Mais nous crions très fort que nous voulons vivre, que nous aimons et
que nous le pouvons.
Notre isolement est plus intolérable encore lorsqu’il s’agit de notre
indépendance économique : nous voudrions supprimer cette
ségrégation des lois sociales vis-à-vis de nous, femmes
plus âgées, c’est-à-dire révision des salaires, planification
des retraites. Nous voudrions aussi notre voix quant au marché du travail,
quant à l’assistance médicale (et en particulier être reconnues
comme des personnes à part entière par les médecins).
Nous voudrions aussi l’aide économique vigilante pour celles qui en ont
le plus besoin; la société le leur doit.
Cela n’est qu’une petite partie de nos exigences, mais il faut bien savoir que
nous, femmes âgées, nous ne nous plaignons pas, mais que simplement,
nous voulons VIVRE, même si notre corps change, au même titre que
toute autre femme qui anime notre monde ".
Ce message magnifique nous a été passé
par Aurélia, une congressiste américaine.
Très digne, chaleureuse, ardente, Aurélia a soixante-dix ans.
Elle a témoigné avec éclat, que la vie d’une femme ne s’arrête
pas au " retour d’âge ".
Maddy
(…) " Nouvelles Féministes " - Mai 1976.
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